Il
était une fois une petite fille de village. Elle vivait seule avec sa
mère et bien qu’encore très jeune et innocente, la rudesse du quotidien
lui avait fait développer un fort caractère et une grande détermination
en toute chose. Elle avait fort bon cœur et un esprit porté vers
l’idéal, si bien qu’elle cherchait toujours à ce que chaque tâche fût
accomplie de la manière la meilleure et la plus efficace qu’il eût put
être. Les goûts précoces de cette enfant étaient déjà bien définis et
chaque jour la voyait porter son chaperon favori : un charmant chaperon
violet dont un jour son bon parrain lui avait fait cadeau. C’est ainsi
que partout on l’appelait le Petit Chaperon violet.
Un
jour, sa mère, ayant cuit et fait des galettes, lui dit : Va voir comme
se porte ta mère-grand, car on m’a dit qu’elle était malade. Porte-lui
une galette et ce petit pot de beurre. Le Petit Chaperon violet
s’empressa d’enfiler ses souliers, vérifia l’équilibre des deux pendants
de ses lacets, qu’elle noua fermement, puis parti aussitôt pour aller
chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre village.
Elle
allait comme toujours, de vive allure, et ses cheveux noués, en
rebondissant à chacun de ses pas, faisaient sautiller sa silhouette.
Entendant craquer les branches sous ses petits pieds déterminés, le loup
s’approcha pour l’observer. Le petit chaperon violet avait bonne mine,
de jolies joues roses et un mollet bien appétissant pour le loup affamé.
Ses grands yeux, verts et candides, la révélaient sans malice et le
loup en un instant discerna en elle une proie facile. Cependant, les
bûcherons que l’on entendait travailler non loin lui firent mesurer ses
ardeurs et il se retint de la dévorer sur le champ.
Le
petit chaperon violet était certes dévolue mais aussi bien gourmande,
et elle s’était arrêtée au bord du chemin pour ramasser des fraises des
bois. Le loup en profita pour l’aborder de la sorte: Bien le bonjour,
jeune demoiselle. Que fais-tu seule par ici en ces bois ? Bonjour
compère. Rends-moi donc service et prends ce panier, lui répondit le
petit chaperon violet, tandis qu’elle cherchait à atteindre un groupe de
fraisiers au delà d’un amas de ronces. Je me rends chez ma mère-grand,
poursuivit-elle lorsqu’elle en eu terminé. La pauvre est mal en point et
ma mère m’envoie lui porter une galette qu’elle a cuit ce matin, ainsi
qu’un petit pot de beurre. Ma foi, je lui porterai aussi de ces fraises.
En veux-tu quelques-unes ? Il y en a ici bien assez pour trois et tu me
sembles bien efflanqué. Habite-t-elle donc loin ? lui demanda le loup,
acceptant par obligation les fruits satinés mais salivant pour les
doigts tendres qui les tendait. Ma foi, assez oui. Vois-tu le moulin à
la croisée des chemins à la sortie de ce bois ? Ma mère-grand habite
encore au delà. Eh bien, dit le Loup, je veux l’aller voir aussi ; je
m’y en vais par ce chemin-ci, et toi par ce chemin-là, et nous verrons
qui plus tôt y sera.
Ne
te donne pas cette peine, lui rétorqua le petit chaperon violet, tirant
de sa poche un carnet à la couverture de cuir. Vois: j’ai répertorié
ici chaque possible chemin; entre tous, celui-ci est le plus rapide.
Celui-là est en réalité plus court, mais la forêt y est trop dense et
ralentit le pas. Suis moi, je te guiderai. Sans laisser au loup d’autre
choix que de lui emboîter le pas, le petit chaperon violet parti de
l’avant.
En
chemin, elle fût intarissable. Elle lui conta sa mère-grand, qui
toujours elle dormait avec son bonnet, enfouie sous les draps jusqu’au
cou, et comme, avec ses cousines, elles jouaient parfois à se faire
passer pour la veille femme, prenant sa place au lit si une voisine
venait à lui rendre visite alors qu’elle était sortie. Elle lui décrit
le système fort complexe de sa serrure, qui disait-on, avait été créé
par un inventeur, un original qui avait vécu deux siècles auparavant. À
chaque embranchement, elle lui décrivait en détail les inconvénients de
cet autre itinéraire et en quoi celui qu’ils empruntaient ensemble était
préférable. Le loup la suivait péniblement, affaibli par plusieurs
jours de jeun, et épuisé de devoir adopter son rythme énergique.
Cependant, toute à son incessant bavardage, le petit chaperon violet
n’avait nullement conscience de son désarroi. Ainsi, elle poursuivait
gaiement : elle lui relata ses mésaventures, la semaine précédente,
lorsqu’en chemin pour le marché, une de ses oies s’échappa, et comme il
lui fallût la chercher deux heures durant dans chaque recoin du village.
Comme, lorsqu’enfin elle la retrouva, l’heure du marché avait passé et
qu’en pleurs elle s’en retourna vers sa demeure. Comme, prenant pitié,
un bourgeois du hameau voisin qui s’était attardé lui acheta finalement
son oie à fort bon prix. Elle lui décrivit chaque oiseau qu’elle
connaissait et ses habitudes, et commenta chaque champignon qu’elle ne
connaissait pas. Enfin elle s’interrompit, prenant soudain conscience du
silence environnant. Elle se retourna et aperçu au loin le loup affalé
au sol. Elle s’empressa de le rejoindre, tenta de le ranimer mais il
était trop tard. Terrassé par son babillage, le loup avait péri d’une
hémorragie interne.
J'ai bien rigolé... Me demande ce qui a bien pu t'inspirer cette histoire... ^^
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