Mardi
soir, 18 h 08. Ce soir, pas d’heures sup, ils partaient à l’heure et
pour une fois ensemble. C’était rarement le cas, parce que le matin elle
passait toujours trop de temps à se maquiller, et le soir elle
finissait toujours juste ça vite fait en cinq minutes ou quinze. Mais ce
soir pour une fois ils enfourchaient leurs vélo en même temps.
À
travers Midsummer Common et aux feux rouges, ils (et surtout elle)
bavardent un peu et commentent la journée. À deux rues de la maison,
elle réalise soudain et en râlant que ses plans élaborés le matin lui
étaient sortis de l’esprit. Elle avait prévu de passer au supermarché
sur le retour, il lui fallait une écumoire et quelques oignons pour
préparer knepflas et filets de poulet au cidre et à la moutarde (avec
des oignons) le lendemain soir. Une fois par semaine c’était échange
culinaire avec des copains-collègues et ce mercredi c’était son tour à
elle de cuisiner.
La
fatigue lui tombait souvent dessus sur le trajet —pourtant court— entre
leur lieu de travail et la maison. Passée la porte du bâtiment, le
premier pas dehors et sa bouffée d’air frais étaient toujours une
régénérescence après
une journée passée au milieu des ordis et sous l’air conditionné. Sauf
les jours de pluie. Ceci dit et contre toute attente, il ne pleut pas
tant que ça à Cambridge. Ils arrivaient détrempés à la maison environ
trois fois par an, une moyenne somme toute fort raisonnable. Quoi qu’il
en soit, elle ne s’expliquait pas bien comment après un départ si
positif la fatigue l’engluait rapidement sur le retour, si bien
qu’elle arrivait en général avec pour seule envie de se vautrer
lamentablement.
Là,
à deux rues de la maison donc, elle était bien avancée sur la courbe
d’engluement et tout en sachant qu’il ne s’agissait pas du choix le plus
raisonnable elle décida d’abandonner le détour par le supermarché. La
flemme, elle irait demain soir. Mais en une rue il sût la convaincre:
après tout la zone commerciale se trouvait à deux pas et elle n’aurait
pas le temps de tout faire le lendemain. En plus, il s’occuperait du
repas du soir pendant ce temps. Elle pris donc à gauche juste avant
d’entrer leur rue, direction Tesco. Premier mini rond point, deuxième,
passage piéton, un bout de Newmarket road et voilà, déjà arrivée. Ça ne
demandait effectivement pas un gros effort.
Elle
saute de son vélo, le pose contre la barre, sort les clefs de sa poche,
et jure. Quelle cruche. Elle avait dû changer sa chambre à air ce midi,
et avait détaché son antivol du guidon. S’ils étaient partis
ensemble ce soir, c’est parce qu’évidemment elle avait laissé l’antivol
dans le jardin et qu’ils avaient dû attacher leurs deux vélos l’un à
l’autre.
En
finissant de grogner, elle enfourchât à nouveau son vélo. Remonter le
long du parking, un bout de Newmarket road, à gauche juste avant le feu
piéton, à droite au mini rond point, à gauche au second puis à droite
dans Geldart street. Heureusement que tout ça prenait cinq minutes. En
arrivant derrière la haute palissade en bois qui caractérise la plupart
des jardins anglais elle eu la surprise de l’entendre bavarder au
téléphone de l’autre côté, dans le jardin. Ah oui tiens, c’est vrai
qu’en partant ce soir il avait oublié ses clefs sur son bureau; puisqu’ils rentraient ensemble et qu’elle avait les siennes il n’était
pas remonté les chercher, à quoi bon?
Il
y a des jours comme ça… Par chance quand tout le monde a des jours
comme ça il arrive qu’au final ça se termine plutôt bien.
oups, désolée j'ai oublié de publier hier !
ReplyDeleteTes lecteurs t'en veulent tellement ! Si tu savais !
ReplyDelete