Il était une fois une petite fille de village, qui vivait avec sa mère non loin d’une forêt. Leur maison, en réalité, se trouvait à l’écart du village et tout autour n’était que vertes plaines et buttes tapissées d’herbes folles. Fille unique, elle avait grandi sans autres enfants alentour. Ils l’impressionnaient lorsqu’elle les rencontrait les jours de marché et elle les trouvait bruyants et par bien trop remuants. Elle avait pour amis les animaux de la ferme: elle faisait classe aux lapins, coursait les poules et chantait des comptines aux chevreaux, mais ses jeux favoris se déroulaient au cœur des prés. Se roulant dans les herbes hautes pour les aplatir, elle aménageait ainsi des châteaux composés de nombreuses pièces et d’interminables couloirs. Elle dévalait les buttes en s’interdisant de ralentir et en s’efforçant de rester sur ses pieds, ou parfois les roulait à dessein. Elle recensait les fleurs et chaque soir en offrait un petit bouquet à sa chère mère. Bien qu’attendrie, celle-ci désespérait souvent de voir son enfant rentrer ravie mais maculée de taches. Un jour, elle lui confectionna un petit chaperon vert à porter lorsqu’elle irait jouer dans les herbes. L’enfant l’affectionnait tant qu’elle le portait en tout circonstance, si bien que partout on l’appelait le Petit Chaperon vert.
Un jour, sa mère, ayant cuit et fait des galettes, lui dit : Va voir comme se porte ta mère-grand, car on m’a dit qu’elle était malade. Porte-lui une galette et ce petit pot de beurre. Le Petit Chaperon vert partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre village. En traversant la forêt, elle rencontra le loup. Fort affamé, celui-ci l'aurait bien dévorée aussitôt, cependant il craignait la présence des bûcherons que l’on entendait travailler non loin. Innocemment, il engageât la conversation. Où te rends tu ainsi à travers bois en cette belle journée? Ma pauvre Mère-grand est malade, je lui apporte une galette que lui a cuit ma mère ce matin, ainsi qu’un petit pot de beurre. Quelle bonne enfant tu fais, s’exclama le loup. Habite-t-elle donc loin ? En effet, lui répondit le Petit Chaperon vert. Je dois encore passer cette clairière puis la rivière et sa maison se trouve ensuite au-delà du moulin. Et bien et bien, belle enfant, j’admire ton dévouement. Si tu le souhaites, je te tiendrai compagnie et viendrai la saluer. Pauvre bonne femme, je le savais pas malade, et j’en suis bien désolé.
Le Petit Chaperon vert, qui aimait beaucoup sa Mère-grand, se réjouit qu’un de ses amis lui rende également visite. Habituée aux doux animaux de la ferme, la belle enfant ne pouvait se douter des terribles intentions du vilain loup. En chemin elle fût intarissable, lui posant mille questions sur la forêt, qu’elle connaissait assez peu, s’arrêtant pour examiner les fleurs qui lui étaient inconnues et battant des mains à la vue des écureuils qui bondissaient de branche en branche. Le loup commençait à perdre patience mais demeurait prudent à l’idée des bûcherons encore trop proches. Cependant, les coups de hache ne se s’étant fait entendre depuis quelques temps déjà, il s’apprêta à bondir sur le Petit Chaperon vert. À cet instant même elle stoppa net et s’écria d’une voie aigüe : Oh, loup, approche ! Regarde cette jolie descente! Voyons qui de nous deux arrivera le premier. Es-tu prêt ? Partons à trois ! Pris de cours et craignant que les cris du Petit Chaperon vert n’aient pu attirer l’attention, le loup n’eût d’autre choix que de se prêter au jeu.
Au signal, tous deux se lancèrent du même pas, mais sur ses quatre pattes le loup la distança presque immédiatement. Grisé par cette course, arrivant au bas de la butte il se retourna prêt à bondir pour enfin la dévorer mais ce faisant, il ne vit la racine d’un gros chêne qui le fit trébucher. Entraîné par son élan il continua de rouler à vive allure pour terminer violemment sa course en chutant contre un large tronc. Le Petit Chaperon vert, en larme, porta le loup inconscient chez sa Mère-grand. Lorsque celle-ci fût rétablie, elle pansa les blessures du loup bien mal en point qui progressivement recouvrit ses forces mais jamais ses esprits. C’est ainsi qu’elle devint la seule Mère-grand du pays à posséder un loup de garde.
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